Foi et charité en Marie

Publié le par Abbé Laffargue

La Foi de Marie

D'après Intimité divine (Méditations sur la vie éternelle pour tous les jours de l'année) du Père Gabriel de Sainte Marie-Madeleine, o. c. d., 1er volume (de décembre à mai), édition de 1963.

 

  "En faisant siennes les paroles de Sainte Elisabeth, l'Eglise adresse à Marie cette très belle louange: Bienheureuse celle qui a cru en l'accomplissement de ce qui lui a été dit de la part du Seigneur ! (Luc 1, 45). En effet, de grandes choses s'accompliront en Marie, et elle eut le grand mérite d'y croire. Sur la parole de Dieu, annoncée par l'Ange, elle crut qu'elle deviendrait mère sans perdre sa virginité; elle, si humble, crut qu'elle deviendrait vraiment la mère de Dieu, que le fruit de son sein serait réellement le Fils du Très-Haut. Elle adhéra, dans une confiance totale, à tout ce qui lui fut révélé, sans hésiter le moins du monde devant un plan qui bouleversait tout l'ordre naturel: une mère vierge, une créature Mère de son Créateur. Elle crut lorsque l'Ange lui parla, mais elle continua à croire aussi quand l'ange la laissa seule et qu'elle se trouva dans les humbles conditions d'une femme quelconque, sur le point de devenir mère. (…)

La Sainte Vierge nous enseigne à croire en notre vocation à la sainteté, à l'intimité divine; nous y avons cru quand Dieu nous l'a révélée dans la clarté de la lumière intérieure, confirmée par la parole de son ministre; mais nous devons y croire encore lorsque nous nous sentons seuls, dans l'obscurité, les difficultés qui tentent de nous ébranler, de nous décourager. Dieu est fidèle, Il ne fait pas les choses à moitié; Il parachèvera son œuvre en nous, pourvu que nous ayons une confiance totale en Lui.

Il serait peu véridique (= vraisemblable) de s'imaginer que, pour la Très Sainte Vierge, les Mystères divins furent si bien dévoilés, et la divinité de son Jésus tellement évidente, qu'elle n'aurait plus eu besoin de croire. Exception faite pour l'Annonciation et les faits qui environnèrent la naissance de Jésus, nous ne trouvons pas en sa vie de manifestations extraordinaires du surnaturel. Elle vécut de pure foi, exactement comme nous, en se fondant sur la parole de Dieu. Les mystères divins eux-mêmes, qui s'accomplirent en elle et autour d'elle, demeurèrent habituellement cachés sous le voile de la foi, empruntant l'allure extérieure commune aux diverses circonstances de la vie ordinaire; bien plus, ils se dérobèrent souvent à sa vue, sous des aspects très obscurs et déconcertants, telles, par exemple, l'extrême pauvreté dans laquelle naquit Jésus, la nécessité de fuir en exil pour Le sauver, Lui, le Roi du ciel, de la furie d'un roi terrestre; les privations enfin, pour Lui procurer le strict nécessaire, qui vint même quelquefois à manquer.

Mais Marie n'a jamais douté que cet Enfant faible et impuissant, qui avait besoin de soins maternels et de protection, comme tous les autres enfants, ne fût le Fils de Dieu. Elle a toujours cru, même quand elle ne comprenait pas. Ainsi en fut-il, par exemple, lors de la disparition imprévue de Jésus, demeuré au Temple, à l'âge de douze ans, à l'insu des siens. Saint Luc fait remarquer que lorsque l'Enfant en expliqua le motif, alléguant la mission qui Lui avait été confiée par le Père céleste, Marie et Joseph ne comprirent pas la parole qu'il venait de leur dire (2, 50). Si Marie avait la certitude que Jésus était le Messie, elle ne savait cependant pas de quelle manière Il accomplirait sa mission; ainsi, ne comprit-elle pas, au moment même, quelle relation pouvait exister entre la volonté divine et le fait de s'attarder au Temple. Toutefois, elle n'interrogea pas davantage: elle savait que Jésus était son Dieu et cela lui suffisait; elle était sûre, absolument sûre de Lui.

L'âme de foi ne s'attarde pas à examiner la conduite de Dieu et, tout en ne comprenant pas, elle croit et suit aveuglément les dispositions de la volonté divine. Quelquefois, nous nous arrêtons, dans notre vie spirituelle, parce que nous voulons trop comprendre, trop scruter les desseins de Dieu sur notre âme. Le Seigneur ne nous demande pas de comprendre, mais de croire de toutes nos forces.

Prière: (…) Oui, ô Marie, conduisez-moi par le raccourci de la pleine confiance en Dieu. Ô vous, qui êtes bienheureuse pour avoir cru, augmentez ma foi, rendez-la ferme, inébranlable, invincible. C'est à votre foi que nous sommes redevables de l'accomplissement des promesses du Seigneur; faites-moi partager cette foi, afin que je croie en Lui, à ses paroles, à ses promesses, à ses invitations, sans l'ombre d'un doute, sans hésitation, sans incertitude. Le doute m'arrête, l'hésitation me paralyse, l'incertitude me rogne les ailes… Ô Marie, faites que je croie pleinement, afin que je puisse me donner pleinement à Dieu, adhérant à tous ses plans, acceptant les yeux fermés n'importe quelle disposition de la divine Providence. Donnez-moi de croire, afin que je puisse défier les tempêtes avec courage, m'abandonner pleinement à l'action du Seigneur, et avancer avec confiance dans la voie de la sainteté. Si vous êtes avec moi, ô Marie, je ne craindrai rien; la force de votre foi sera le soutien et le refuge de la mienne, si faible et languissante."

 

                                    Le développement de la charité en Marie

D'après Intimité divine (Méditations sur la vie éternelle pour tous les jours de l'année) du Père Gabriel de Sainte Marie-Madeleine, o. c. d., 1er volume (de décembre à mai), édition de 1963.

 

   "Il ne faudrait pas croire que la Très Sainte Vierge Marie ait été dispensée de toute activité personnelle, de tout progrès, parce qu'elle possédait, dès son origine, le plus haut degré de sainteté, auquel n'a jamais pu prétendre le plus grand saint. Loin de là ! Pour elle aussi, comme pour nous, cette vie fut la voie par laquelle il faut toujours progresser en charité; la correspondance personnelle à la grâce lui fut demandée, à elle comme à nous. Et le grand mérite de Marie consiste précisément à avoir correspondu, avec la fidélité la plus grande, aux immenses dons reçus.

Certes, les privilèges de sa conception immaculée, de l'état de sainteté dans lequel elle naquit, et de sa maternité divine, furent de purs dons de Dieu. Toutefois, loin de les recevoir passivement – tel qu'un écrin reçoit les objets précieux qu'on y place – elle les a reçus en tant que personne libre, capable d'adhérer aux faveurs divines par sa propre volonté, moyennant une pleine correspondance à la grâce. Saint Thomas enseigne que, si Marie ne put mériter l'Incarnation du Verbe, elle mérita cependant, par la grâce reçue, ce degré de sainteté qui fit d'elle la digne mère de Dieu (St Th. d'Aquin, Somme théologique, IIIa pars, qu. 2, art. 11, ad 3m) , et elle le mérita justement par sa correspondance à la grâce.

Nous pouvons donc considérer aussi en Marie le progrès de sa sainteté, progrès qui ne dépendait pas uniquement  de  la nouvelle abondance de grâce que Dieu avait répandu en elle à certains moments déterminés de sa vie – comme il y a tout lieu de croire qu'Il le fit au moment de l'Incarnation – mais également de son activité personnelle, tout informée par la grâce et la charité, qui lui permit de faire fructifier le trésor confié par le Seigneur. Marie, est, dans toute la force du terme, la Vierge fidèle qui sut faire rapporter du cent pour cent aux talents reçus de Dieu.

La plus grande mesure de grâce, qui fut jamais donnée à une simple créature, lui fut concédée par pure libéralité divine et en vue de la mission très élevée à laquelle elle était destinée, mais elle y correspondit aussi avec la plus grande fidélité dont une créature soit capable.

Ainsi, il y a plénitude de grâce de la part de Dieu, et plénitude de fidélité du côté de Marie, si bien que, sans jamais s'arrêter – dit Saint Alphonse – sa belle âme volait toujours vers Dieu et croissait en amour.

(…) On conçoit dans quelle proportion dut se développer, en l'âme de Marie, le capital de charité et de grâce que Dieu y avait placé au premier moment de son existence. Lorsque nous songeons, comme le fait remarquer Saint Jean de la Croix (La Montée du Carmel, L. III, chap. 2. Ndlr) que l'âme de la Vierge ne fut jamais mue, ni donc retardée, par l'attachement aux créatures – et que, par conséquent, il n'y eut jamais en elle de fins secondes, humaines, ni de petitesses provenant de l'égoïsme – mais qu'elle agissait toujours purement sous l'impulsion de l'Esprit Saint, nous devons conclure que Marie crût continuellement en grâce et que la charité devint en elle vraiment abyssale. (…)

C'est précisément l'élan généreux et fidèle avec laquelle elle répondit aux invitations divines, s'associant à toute manifestation de la volonté de Dieu, acceptant n'importe quelle disposition de la divine Providence et accomplissant tous ses devoirs quotidiens, qui l'a établie en ce magnifique état de progrès incessant et rapide dans l'amour.

Puisse l'exemple lumineux de Marie nous encourager à nous appliquer de tout notre cœur au service de Dieu, afin que nous puissions croître rapidement, nous aussi, dans la charité.

Prière: (…) Qui est celle-ci qui monte du désert, appuyée sur son Bien-Aimé ? (Cant. 8, 5). C'est vous, ô ma Mère, vous qui, sous la conduite de l'Esprit Saint et soutenue par Lui, êtes montée toujours de grâce en grâce, de vertu en vertu.

Ô Mère du bel amour, pleine de grâce, ô Vierge fidèle, aidez-moi à correspondre avec fidélité aux dons de Dieu !

Ne permettez pas que la grâce soit stérile en moi à cause de ma misère. Aidez-moi, ô ma Mère, à vaincre les innombrables résistances de ma nature molle et lâche, attirez-moi par votre exemple, afin que je puisse vous suivre avec élan dans la voie de la charité parfaite. (…)"

 

(Bulletins paroissiaux de mai 2011)

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