La réforme de Benoît XVI (Mgr Nicola Bux)

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"La réforme de Benoît XVI

La liturgie entre innovation et tradition" par Mgr Nicola BUX.

Préface de Mgr Aillet, évêque de Bayonne, Lescar et Oloron pour l'édition française;

Préfaces de Vittorio Messori pour l'édition italienne; du Cardinal Canizares, préfet de la Congrégation romaine pour le Culte divin et la Discipline des Sacrements, pour l'édition espagnole.

Editions Tempora, Perpignan, 2009 pour la traduction française

204 pages, 17,90 €

Mgr Bux, spécialiste de la liturgie byzantine, est professeur de liturgie à l'Institut de théologie de Bari (Italie), consulteur de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, de la Congrégation pour les Causes des saints et, depuis septembre 2008, du Bureau des Célébrations liturgiques pontificales.

Il a accordé un entretien au mensuel "La Nef" d'octobre 2009 (pages 18 à 21).

"La liturgie est donc sacrée si elle n'est pas faite de mains d'homme; dans le cas contraire, elle serait une idolâtrie. Dans la liturgie, on trouve le feu du buisson ardent qui ne se consume pas, la Jérusalem céleste qui descend du ciel, l'incarnation et la naissance de Jésus, la transfiguration et le Calvaire, la résurrection et la Pentecôte. En un mot, il s'agit de l'extase de la beauté qui embrase le cœur des hommes du feu de Dieu. (…)

Par conséquent, le fait de désobéir aux normes qui régissent une telle sacralité, au nom d'un libre-arbitre qui conduit à créer ses propres normes, a pour effet de désacraliser et de séculariser la liturgie." (pp. 22-23)

"J'ai reçu du Seigneur ce que je vous ai transmis (1 Cor 11,23), nous dit Saint Paul. C'est pourquoi, la liturgie se reçoit de la tradition: elle est un don que nous recevons. Et elle est elle-même la tradition." (p.34)

"On a accordé trop d'importance à l'effet du rite, à ce qui se passe après lui. En effet, l'efficacité du rite est immédiate: moins nous parlons, et plus le rite communique avec notre être. Le rite laisse à Dieu son caractère inexprimable, indicible: il vaut mieux contempler le mystère que le conceptualiser. Telle est la raison de l'attitude d'obéissance inconditionnelle que le ministre et le fidèle doivent adopter vis-à-vis du rite. La sainte messe est comme une œuvre musicale écrite par un compositeur: elle doit être exécutée avec une absolue fidélité et, dans ce sens, elle n'a pas à être interprétée, c'est-à-dire déformée."

Puis, l'auteur, citant le pape Benoît XVI dans son Jésus de Nazareth (chap.V), met en garde contre l'exhibition de soi-même à la place de (l'attitude d') l'adoration et le fleuve de paroles qui étouffent l'action de l'Esprit-Saint. Il ajoute, en mettant en cause les cérémoniaires, qu'à une époque caractérisée par la manie de paraître on peut arriver à une tendance exagérée, sinon perverse, de se mettre en scène, c'est-à-dire à une sorte d'exhibitionnisme.

C'est peut-être l'une des conséquences de la position face à l'assemblée, et non pas vers le Seigneur. (pp. 133-134)

La participation des fidèles:

"Saint Cyprien, évêque de Carthage au IIIème siècle, recommandent à ceux qui prient de le faire en silence et avec crainte, et en pensant qu'ils sont en présence de Dieu. Il déclare: Souvenons-nous que nous sommes en présence de Dieu et que nous devons plaire à ses regards humains par l'attitude de notre corps et le calme de notre parole. L'insensé pousse de grands cris; l'homme respectueux prie avec modestie. (…) Quand nous nous réunissons pour offrir avec le prêtre le divin sacrifice, prions avec recueillement. Gardons-nous bien de jeter à tous les vents des paroles sans suite et de formuler tumultueusement une demande dont la modestie doit faire tout le prix. Dieu n'écoute pas la voix, mais le cœur. Il n'est pas nécessaire de l'avertir par des cris, puisqu'il connaît les pensées des hommes(…). Le Publicain n'élevait pas insolemment ses regards vers le ciel, il n'agitait pas ses mains hardies; mais frappant sa poitrine, et, par cet acte, se reconnaissant pécheur, il implorait le secours de la miséricorde divine.(Saint Cyprien, "Traité sur le Notre Père", nn. 4-6…)

Les attitudes qui expriment l'adoration (commune non seulement aux catholiques, mais aussi aux juifs et aux musulmans), c'est-à-dire la prostration ou l'agenouillement, ont été pratiquement interdites (ne serait-ce que par la suppression des agenouilloirs! Ndlr).

Le culte catholique est passé de l'adoration de Dieu à l'exhibition du prêtre, des ministres et des fidèles. (…)

On a réussi à imposer les applaudissements, y compris durant les funérailles, à la place du deuil, qui normalement s'exprime par des larmes. Le Christ n'a-t-il pas pleuré lorsque Lazare mourut ? (Le Cardinal) Ratzinger a donc raison quand il dit: Quand les applaudissements font irruption dans la liturgie, c'est un signe très sûr qu'on a perdu l'essence de la liturgie, et qu'on l'a remplacée par une sorte de divertissement de type religieux.* Quel évêque aura le courage d'aller à contre-courant ?" (pp. 139-143).

(*Joseph Ratzinger, "Introduction à l'esprit de la liturgie", San Paolo, Casinello B. 2001, p. 195)

(p.156 de l'édition française, éd. Ad solem, Genève, 2001. Ndlr)

Le concile, le latin et le grégorien pp. 171-184

(…) "La musique sacrée contemporaine n'est-elle pas devenue une musique utilitaire ? La célébration doit conserver un équilibre phonique homogène: c'est pourquoi, il est indispensable de ne pas chanter trop fort les cantiques et les prières. De plus, puisque nous nous tenons en présence de Dieu, cela nous conduit à adopter une attitude d'humilité et de discrétion. Il faut donc éviter les tons qui incitent à crier et favoriser ceux qui encouragent la modération. (…)

Avant la musique, et pour qu'elle puisse exister, la liturgie comporte le silence qui est fondamental pour pouvoir se mettre à l'écoute de Dieu qui parle à notre cœur. L'âme n'est pas faite pour le bruit et les discussions, mais pour le recueillement; et il est vrai que le bruit nous gêne. Il faut donc avant tout restituer à l'église sa dignité d'édifice sacré, où personne ne parle à voix haute, à commencer par les prêtres et les ministres, mais où tous doivent se tourner vers Dieu dans l'humble silence de la prière, qui peut être aussi formulée à voix basse. Il faut avoir le courage d'éloigner du sanctuaire tout ce qui s'oppose à la piété chrétienne ou offense le vrai sens religieux."(pp. 178-179)

L'orientation du prêtre vers Dieu

"Jusque récemment, les liturgies de l'Orient et de l'Occident chrétiens comportaient cet élément commun: l'orientation du prêtre à l'autel vers Dieu; il ne se tournait pas vers le peuple que pour les salutations et les exhortations. Or, depuis une quarantaine d'années, l'Occident a pris un autre chemin en décidant que le prêtre se tournerait en permanence vers le peuple.

Ce changement d'orientation dans la liturgie a provoqué une dérive de la foi elle-même." (p.31)

(…) "L'invitation: Elevons notre cœur (sursum corda) est suivie de la réponse: Nous le tournons vers le Seigneur (habemus ad Dominum). La prière est donc orientée vers Dieu, car il s'agit de rendre gloire à Dieu tous ensemble. (…)

Le liturgie est, par nature, dépendante de Dieu; ainsi, la célébration du culte a pour but de le glorifier: telle est la signification profonde de la prière orientée vers Dieu, vers l'Orient." (p. 37)

Vers l'Orient, le tabernacle, la croix:

"Jusqu'au concile (Vatican II, 1962-1965; Ndlr), l'ensemble des chrétiens de l'Orient et de l'Occident, y compris les prêtres, priaient en se tournant vers l'abside de l'église. (…)

Le prêtre se tournait vers les fidèles pour les exhortations, les lectures et l'homélie. C'est de cette manière que tous les chrétiens ont célébré durant les premiers siècles" (le prêtre " ne tournait pas le dos aux fidèles mais, prêtres et fidèles étaient tournés vers le Seigneur", l'autel et le tabernacle étant dans l'abside).

Le Cardinal Ratzinger souhaitait qu'on retrouve "la tradition apostolique de l'orientation vers l'Est des édifices chrétiens, et aussi de l'action liturgique, là où c'est possible" (L'esprit de la liturgie, éd. Ad Solem, pp. 56 à 71).

"Si l'on considère comment les prêtres orientaux célèbrent la divine liturgie, on peut constater que, dans le nouveau rite, on a vraiment abandonné la tradition apostolique, dont, selon Saint Basile, nous avons reçu l'enseignement de se tenir vers l'orient tandis que nous prions; mais peu d'entre nous savent que nous cherchons la patrie antique, le paradis que Dieu avait planté en Eden, en Orient. (De spiritu Sancto, chap. 27, §66)

(pp. 143-145)

A propos du prêtre placé au centre du sanctuaire avec son siège: p. 147.

Abbé Christian LAFFARGUE,

Tossiat, décembre 2009.

Sur l'orientation de l'autel, voir aussi Un chant nouveau pour le Seigneur (Cardinal Ratzinger),

éd. Desclée-Mame, Paris, 1995, chap. II, p. 119

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