S'il me manque l'amour, tout cela ne me sert à rien  (1 Cor 13, 3) - 4ème dimanche du T.A.-C

Publié le par Abbé C. Laffargue

Bulletin dominical du 3 février 2019 – 14èmeannée

4èmedimanche du Temps de l'Année liturgique (C)

 

LES TEXTES DE LA MESSE

 

            S'il me manque l'amour, tout cela ne me sert à rien

            (1 Corinthiens 13, 3 – IIème lecture)

 

            Quand on relit ce texte bien connu et souvent choisi dans les mariages, on... tremble. Car, qui d'entre nous peut prétendre aimer vraiment ? D'autant que la charité (vertu théologale qui n'est pas n'importe quel amour) semble s'être retirée de l'Eglise en cette crise qui n'en finit pas et qui voit sa disparition numérique et visible s'accentuer au fil des jours en Occident. On se sent, malgré soi, imprégné de cette froideur, de cette indifférence, de cet égoïsme qui nous entoure et nous enveloppe. C'est marquant et éprouvant pour les prêtres qui n'ont pas de famille ou sont loin de la leur, et de certains célibataires.

On comprend l'importance, dans ce climat, de communautés sacerdotales ou religieuses, mais dont la tendance est d'aimer fraternellement les membres de sa communauté devenue une famille et d'être indifférentes à ceux qui n'en font pas partie ou qui n'en partagent pas inconditionnellement les choix pastoraux ou liturgiques, l'état d'esprit, "la ligne"... C'est la dérive du communautarisme.

On côtoie, certes, et c'est réconfortant d'une certaine manière, des prêtres vertueux et édifiants, mais dépourvus d'amour exprimé. Une sainteté sans amour. Comme s'ils se protégeaient. Comme si les combats qu'ils mènent avec succès pour rester fidèles usaient toutes leurs forces. Alors qu'aimer, c'est se livrer, s'ouvrir, s'épanouir, laissant la grâce divine, tout amour et pardon, s'écouler et rayonner. La joie, l'attention aux autres, à ceux de leurs frères et sœurs qui n'ont pas "de parti". L'amitié. Les gestes d'amitié, la tendresse. Soyez entre vous pleins de générosité et de tendresse. Pardonnez-vous les uns aux autres, comme Dieu vous a pardonné dans le Christ (Ephésiens 4, 32) (1).

Il est sûr, il est certain, qu'au soir de cette vie nous serons jugés sur l'amour (St Jean de la Croix, maxime 80) (2).

A ce moment-là, on aura beau être prophète, avoir toute la science des mystères et toute la connaissance intellectuelle de Dieu, avoir même la foi jusqu'à transporter les montagnes, distribuer toute sa fortune aux affamés, se faire brûler vif, s'il nousmanque l'amour cela ne sert à rien (1 Cor 13, 2-3).

Celui qui n'aime pas demeure dans la mort (1 Jean 3, 14)L'enfer, c'est de ne plus aimer (Bernanos) (3).

L'amour de charité n'entretient pas de rancune..., il supporte tout, il fait confiance en tout, il espère tout, il endure tout. Cet amour-là ne passera jamais (1 Cor 13, 5-8).

 

Sur cette terre, nous marchons à tâtons. Guidés dans la nuit obscure de la foi. Dans cette nuit les aridités font marcher l'âme avec pureté en l'amour de Dieu, puisqu'elle se meut (...) pour seulement plaire à Dieu écrit saint Jean de la Croix (4). Car c'est vers l'Amour que nous allons. Même si on a la foi, et une foi conforme à l'enseignement de Dieu et de l'Eglise, fidèle aux commandements, cette foi est inutile car, en réalité, celui qui n'aime pas n'a pas connu Dieu, car Dieu est amour (1 Jn 4, 8).

Connaître Dieu, c'est L'avoir rencontré personnellement et en vivre tous les jours. Sinon, c'est réduire notre religion à une loi, à de multiples lois et "ordonnances", comme les juifs qui étaient fidèles à la lettremais avaient perdu l'esprit. D'où cette dureté, cette distance, cette froideur quelquefois polie qui nous glace.

 

Aujourd'hui, ma connaissance est partielle, mais dans le face à face, si nous avons été et sommes toujours à l'heure de notre mort le miroir de l'Amour de Dieu, nous Le connaîtrons parfaitement, comme nous avons été connus. Aujourd'hui, ce qui demeure, c'est la foi, l'espérance et la charité; mais la plus grande des trois, c'est la charité (1 Cor 13, 12-13).

 

                                                                                                       Abbé Christian LAFFARGUE.

 

(1) Liturgie des Heures, vendredi, aux Laudes de la première semaine.

(2) Cité par le Pape François lors de l'Angelus du 26 nov. 2017 à Rome. Saint Jean de la Croix dira aussi: L'âme énamourée (amoureuse de Dieu) ni ne fatigue, ni ne se fatigue (maxime 144).

(3) Bernanos. Journal d'un curé de campagne, entretien avec la comtesse.

(4) La nuit obscure, Livre I, chap. 13.

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